La difficulté de parler de foi dans l’espace public
Un colloque sur la thématique de la relation entre foi et espace public a eu de la difficulté à trouver une salle à cause de son sujet religieux.
Le forum Foi et Espace public a tenu sa première édition le 12 octobre dernier au Château Royal à Laval. Cette salle de réception n’était pas la première sur la liste des organisateurs de l’événement, c’est plutôt une série de refus qui leur fit considérer l’emplacement.
« Le fait de se faire refuser n’a qu’augmenté notre envie de tenir l’événement », explique Oscar Hernandez, directeur des opérations de l’Association d’Églises Baptistes Évangéliques du Québec (AEBEQ) et responsable du colloque. Il raconte que certains des échecs de réservations de local comportaient des éléments louches. Par exemple, un possible emplacement avait signé avec lui une réservation de date, avant de finalement rejeter la location après avoir obtenu plus de détails sur le forum. La raison donnée fut celle d’un conflit d’horaire.
La recherche de salle était d’autant plus compliquée par la décision de ne pas tenir la discussion dans un lieu de culte. Puisque des gens de différentes fois et expressions étaient rassemblés, les organisateurs voulaient garder une neutralité religieuse quant à l’emplacement. M. Hernandez évoque aussi l’impossibilité d’occuper une salle d’université.
Selon l’équipe d’organisation du forum, cette difficulté à trouver une salle a probablement été accentuée en réaction aux polémiques qui ont touché le Centre des congrès de Québec pour des enjeux de croyance.
Pour rappel, en juin dernier, la ministre du Tourisme Caroline Proulx a résilié un contrat de location au centre des congrès avec le groupe baptiste Harvest Ministries International. Au mois de septembre, c’est le congrès du Parti conservateur du Canada qui a créé la controverse au Centre à cause de l’aménagement de salles de prière dans celui-ci.
Les personnes religieuses sont « des citoyens de deuxième ordre, on ne peut même pas louer d’espace public c’est devenu systémique », affirme le directeur général de l’AEBEQ, Louis Bourque. Il ajoute que les non-religieux sont les seuls qui trouvent leur compte dans la laïcité, puisqu’il ressent celle-ci comme une anti-religion plutôt qu’une véritable neutralité.
Une première tout de même réussie
Malgré les problèmes rencontrés, l’organisation considère que l’événement a été une réussite. Environ 65 personnes étaient sur les lieux pour assister aux discussions, ce qui est en bas des attentes qu’avait M. Hernandez. Le forum reste selon lui « un succès pour une première, ce qui témoigne d’une réussite oui ça pourrait être le nombre, mais dans notre cas c’est la variété des gens qu’on a pu rassembler à une même table ».
En effet, des représentants de plusieurs groupes des trois religions abrahamiques étaient sur place et ont pu échanger. Cet aspect œcuménique est le résultat des démarches de Jean-Christophe Jasmin, directeur des affaires publiques à l’Union des Églises Baptistes Francophones du Canada.
Le projet initial ne devait rassembler que baptistes et évangéliques, mais M. Jasmin trouvait qu’il ne servirait pas à grand-chose de « faire une discussion avec des gens qui partagent tous la même vision ». Il proposa donc d’inviter aussi des représentants catholiques à la table, une chose qu’il pense n’aurait jamais été acceptée dans sa communauté il y a 15 ans.
Finalement, en plus des catholiques, les autres membres de la table interreligieuse de concertation du Québec, mise sur pied durant la pandémie ont été invités. Maintenant qu’une première a été organisée, le comité de planification espère enfaire un événement récurrent pour encourager la discussion entre les groupes religieux.