L’isolement tue
Il est parfois plus mortel que la COVID-19, selon une vaste étude américaine
Les centres d’hébergement pour aînés qui ont appliqué avec le plus de rigueur les mesures sanitaires contre la COVID-19 ont été plus efficaces pour limiter les éclosions entre leurs murs dans les premières semaines de la pandémie. Mais ces résultats cachent un important angle mort : les résidants de ces établissements ont été au fil des mois plus nombreux à mourir pour d’autres raisons, possiblement liées à l’isolement et à la solitude, révèle une nouvelle étude américaine.
« Prévenir les cas de COVID-19 et les décès associés vient avec un coût » dans les centres d’hébergement, indiquent deux chercheurs de l’Université de Notre Dame dont l’étude publiée dans le Journal of Health Economics, a été financée par le National Institute of Health.
Ces chercheurs ont analysé les données sur les cas de COVID-19 et les décès survenus dans plus de 15 000 centres d’hébergement américains. Aux États-Unis, la qualité de ces centres est évaluée sur une échelle de 1 à 5 étoiles selon des critères bien précis par les Centers for Medicare and Medicaid. Les établissements qualifiés de « 5 étoiles » ont notamment de meilleurs ratios personnel-résidant,
rapportent moins de chutes et moins de plaies de pression.
Les centres d’hébergement pour aînés qui ont appliqué avec le plus de rigueur les mesures sanitaires contre la COVID-19 ont été plus efficaces pour limiter les éclosions entre leurs murs dans les premières semaines de la pandémie. Mais ces résultats cachent un important angle mort : les résidants de ces établissements ont été au fil des mois plus nombreux à mourir pour d’autres raisons, possiblement liées à l’isolement et à la solitude, révèle une nouvelle étude américaine.
« Prévenir les cas de COVID-19 et les décès associés vient avec un coût » dans les centres d’hébergement, indiquent deux chercheurs de l’Université de Notre Dame dont l’étude publiée dans le Journal of Health Economics, a été financée par le National Institute of Health.
Ces chercheurs ont analysé les données sur les cas de COVID-19 et les décès survenus dans plus de 15 000 centres d’hébergement américains. Aux États-Unis, la qualité de ces centres est évaluée sur une échelle de 1 à 5 étoiles selon des critères bien précis par les Centers for Medicare and Medicaid. Les établissements qualifiés de « 5 étoiles » ont notamment de meilleurs ratios personnel-résidant,
rapportent moins de chutes et moins de plaies de pression.
Dans les premiers mois de la pandémie, les établissements « 5 étoiles » ont été plus rapides à appliquer les mesures de prévention contre la COVID-19. Tout comme les centres de moins bonne qualité, ils ne sont pas parvenus à empêcher le virus d’entrer dans leurs murs. Mais ils ont été beaucoup plus efficaces à limiter la transmission à l’interne. Notamment parce qu’ils ont vécu moins de pénurie de personnel, ont facilité le dépistage et ont appliqué plus rigoureusement l’isolement des résidants.
Les pénuries d’équipement de protection y étaient aussi moins graves.
Si bien que, de janvier 2020 à septembre 2020, les centres 5 étoiles ont enregistré 15 % moins de décès liés à la COVID-19 que les centres de moins bonne qualité. Un écart qui s’est estompé dans les mois qui ont suivi.
Beaucoup se sont toutefois demandé si les précautions pour contenir la COVID-19 « ne venaient pas avec un coût », rapportent les chercheurs de l’Université Notre Dame. « Plusieurs données laissent croire que le manque de contact des résidants avec leurs proches n’a pas seulement créé un sentiment de solitude, d’isolement et de désespoir, mais a aussi possiblement accéléré certains décès », écrivent-ils. Et les données semblent leur donner raison. Fin avril 2021, les centres d’hébergement 5 étoiles américains présentaient en moyenne 8,4 % plus de décès (toutes causes confondues) que les établissements 1 étoile, et 15 % plus de décès non liés à la COVID-19.
Remise en questionPhilippe Voyer, chercheur au Centre d’excellence sur le vieillissement du Québec et professeur à la faculté des sciences infirmières de l’Université Laval, a porté l’étude américaine à l’attention de La Presse. Selon lui, « les établissements de bonne qualité ont si bien performé pour prévenir la COVID-19 en isolant les patients, en diminuant les activités de loisirs, les visites, en ne permettant pas aux résidants de manger ensemble, que le taux de mortalité total est plus grand dans les 5 étoiles que dans les 1 étoile. Parce que les gens sont décédés des effets secondaires de l’isolement. » Ces résidants sont morts de différentes causes, comme de dénutrition, de pertes cognitives ou des conséquences de la diminution de l’accès aux services de santé, entre autres.
De l’avis de Philippe Voyer, cette étude apporte une réponse aux nombreux soignants québécois qui le contactaient en avril et en mai 2020 et qui s’inquiétaient de l’effet de l’isolement sur leurs résidants. « On n’avait pas de données là-dessus à l’époque », dit M. Voyer, qui souligne qu’on « ne peut pas revenir en arrière ».
Mais pour lui, cette nouvelle étude devrait amener les gouvernements à « se remettre en question sur nos façons de faire ».
Les pénuries d’équipement de protection y étaient aussi moins graves.
Si bien que, de janvier 2020 à septembre 2020, les centres 5 étoiles ont enregistré 15 % moins de décès liés à la COVID-19 que les centres de moins bonne qualité. Un écart qui s’est estompé dans les mois qui ont suivi.
Beaucoup se sont toutefois demandé si les précautions pour contenir la COVID-19 « ne venaient pas avec un coût », rapportent les chercheurs de l’Université Notre Dame. « Plusieurs données laissent croire que le manque de contact des résidants avec leurs proches n’a pas seulement créé un sentiment de solitude, d’isolement et de désespoir, mais a aussi possiblement accéléré certains décès », écrivent-ils. Et les données semblent leur donner raison. Fin avril 2021, les centres d’hébergement 5 étoiles américains présentaient en moyenne 8,4 % plus de décès (toutes causes confondues) que les établissements 1 étoile, et 15 % plus de décès non liés à la COVID-19.
Remise en questionPhilippe Voyer, chercheur au Centre d’excellence sur le vieillissement du Québec et professeur à la faculté des sciences infirmières de l’Université Laval, a porté l’étude américaine à l’attention de La Presse. Selon lui, « les établissements de bonne qualité ont si bien performé pour prévenir la COVID-19 en isolant les patients, en diminuant les activités de loisirs, les visites, en ne permettant pas aux résidants de manger ensemble, que le taux de mortalité total est plus grand dans les 5 étoiles que dans les 1 étoile. Parce que les gens sont décédés des effets secondaires de l’isolement. » Ces résidants sont morts de différentes causes, comme de dénutrition, de pertes cognitives ou des conséquences de la diminution de l’accès aux services de santé, entre autres.
De l’avis de Philippe Voyer, cette étude apporte une réponse aux nombreux soignants québécois qui le contactaient en avril et en mai 2020 et qui s’inquiétaient de l’effet de l’isolement sur leurs résidants. « On n’avait pas de données là-dessus à l’époque », dit M. Voyer, qui souligne qu’on « ne peut pas revenir en arrière ».
Mais pour lui, cette nouvelle étude devrait amener les gouvernements à « se remettre en question sur nos façons de faire ».
À trop vouloir prévenir la COVID, on crée autre chose. Pour les premières vagues de la pandémie, on devait être plus restrictifs. Mais aujourd’hui, il faut une autre approche.
Philippe Voyer, chercheur au Centre d’excellence sur le vieillissement du Québec
Membre du conseil d’administration de la Communauté de pratique des médecins en CHSLD, la Dre Andrée Robillard constate que certaines études rapportent les effets néfastes du confinement en CHSLD. « Mais nous ne pourrons jamais savoir ce qui serait arrivé sans cette mesure », indique-t-elle. De l’avis de la Dre Robillard, « c’est la durée exceptionnelle du confinement qui a eu autant d’effets délétères » sur les aînés hébergés. Les taux de mortalité doivent aussi être analysés minutieusement, selon la Dre Robillard. Car des centres d’hébergement, dont certains « moins bien nantis », peuvent transférer de façon plus importante leurs patients en fin de vie vers les hôpitaux plutôt que les accompagner jusqu’à leur décès, ce qui peut jouer sur leur taux de mortalité.
La Dre Robillard incite également à la prudence avant de conclure que l’étude américaine s’applique automatiquement au Québec. Notamment parce que les « nursing homes » américaines ressemblent plus aux ressources intermédiaires du Québec qu’aux CHSLD. Elle retient tout de même que ce qui ressort de l’étude est « l’importance du facteur humain et des liens pour les patients âgés ».
Assouplissements à venir au QuébecCette étude est publiée au moment où Québec annonce des assouplissements aux mesures sanitaires
dans les CHSLD et les résidences privées pour aînés.
Dès samedi, les visites dans les résidences pour aînés et les CHSLD ne seront plus seulement limitées aux proches aidants. Tous les visiteurs devront toutefois montrer leur passeport vaccinal. Un maximum de deux visiteurs par jour, un à la fois, sera autorisé en CHSLD. En résidence pour aînés, un maximum de quatre visiteurs par jour, deux à la fois, seront permis. « Les personnes âgées ont besoin d’avoir de la visite », a dit le premier ministre François Legault.
D’autres assouplissements pourraient aussi venir, a laissé entendre le directeur national de santé publique par intérim du Québec, le Dr Luc Boileau. « Toute la question de tout ce qu’on appelle la prévention et le contrôle des infections dans les milieux de vie, que ce soit les CHSLD ou les RPA, on y travaille activement. On est sur ce dossier avec les équipes ministérielles, les équipes d’experts aussi pour trouver une façon d’alléger ces conditions-là, tout en gérant les risques de contagion, et de nous amener avec une progression rapide vers une gestion plus normale de comment on doit vivre avec le virus. »