Avoir ou ne pas avoir trois parents
Selon la couverture médiatique, notre Cour d’appel vient trancher que le droit québécois ne permet pas à un enfant d’avoir trois parents. Or, qu’il soit opportun ou pas pour le Québec de suivre l’Ontario et la Colombie-Britannique en reconnaissant cette possibilité, l’espèce devant la Cour d’appel n’abordait vraiment pas cette question. Entre autres, le jugement a confirmé les effets de notre régime concernant la procréation assistée.
L’affaire concerne deux épouses lesbiennes qui décident d’avoir un enfant avec l’aide d’un homme. Comme prévu, les deux femmes s’inscrivent sur l’acte de naissance. Elles deviennent donc les parents de l’enfant aux yeux du droit. Quant à lui, l’homme s’implique dans la vie de l’enfant.
Les trois signent un accord qui prend acte de leur arrangement.
Le parent qui n’a pas accouché de l’enfant effectue sa transition afin de devenir un homme trans. La rupture du couple s’ensuit. Les choses tournent au vinaigre. Le donneur de sperme n’est plus le seul homme ou seul « papa » dans la vie de l’enfant et il n’en est pas content. Avec l’appui de la femme qui a accouché de l’enfant, le donneur de sperme réclame la paternité de l’enfant.
En première instance, le juge retient la demande. Il nomme le donneur de sperme père de l’enfant et il efface le second parent de l’acte de naissance. En appel, la Cour rétablit la situation initiale : c’est l’ex-conjoint de la femme qui a donné naissance à l’enfant qui en est le second parent. La Cour prend soin de distinguer les règles de la filiation, qui déterminent la parenté de l’enfant, de la parentalité, le comportement parental et l’exercice de certains attributs de l’autorité parentale. Elle nous rappelle que l’implication du donneur de sperme
dans la vie de l’enfant dont il fut le géniteur ne lui confère pas la paternité.
D’une lecture attentive du jugement, je retiens trois constats.
D’abord, la présence d’une personne trans dans le paysage familial ne change absolument rien dans l’application des règles de la filiation. La Cour d’appel le dit clairement. L’inconfort à l’égard d’une transition, pour ne pas dire la transphobie, n’a pas de portée juridique.
Ensuite, à côté des règles de la filiation, il y a un grand espace pour les figures parentales dans la vie d’un enfant. Nous l’expérimentons à peu près tous les jours dans le cas des familles recomposées. Le jugement nous rappelle que c’est la même chose lorsqu’il s’agit d’un couple lesbien (ou d’une personne seule) qui a un enfant avec l’aide d’un donneur connu. Les vrais parents d’un enfant né à la suite d’une procréation assistée sont ceux qu’identifient les règles de la filiation. Dans ce contexte, c’est l’intention des adultes qui l’emporte, et non pas la biologie.
Enfin, malgré tout ce qui a été dit relativement à la question de trois parents, la Cour d’appel s’est abstenue de la trancher. D’ailleurs, elle s’est montrée plus prudente et beaucoup moins catégorique sur cette question que dans certains de ses jugements.
Bref, le jugement de la Cour d’appel ne modifie pas le droit québécois. Il nous illustre certaines des implications de la grande réforme de 2002, par laquelle le législateur a consacré la légitimité et la véracité de la filiation qui suit la procréation assistée. C’est une décision juste.
L’affaire concerne deux épouses lesbiennes qui décident d’avoir un enfant avec l’aide d’un homme. Comme prévu, les deux femmes s’inscrivent sur l’acte de naissance. Elles deviennent donc les parents de l’enfant aux yeux du droit. Quant à lui, l’homme s’implique dans la vie de l’enfant.
Les trois signent un accord qui prend acte de leur arrangement.
Le parent qui n’a pas accouché de l’enfant effectue sa transition afin de devenir un homme trans. La rupture du couple s’ensuit. Les choses tournent au vinaigre. Le donneur de sperme n’est plus le seul homme ou seul « papa » dans la vie de l’enfant et il n’en est pas content. Avec l’appui de la femme qui a accouché de l’enfant, le donneur de sperme réclame la paternité de l’enfant.
En première instance, le juge retient la demande. Il nomme le donneur de sperme père de l’enfant et il efface le second parent de l’acte de naissance. En appel, la Cour rétablit la situation initiale : c’est l’ex-conjoint de la femme qui a donné naissance à l’enfant qui en est le second parent. La Cour prend soin de distinguer les règles de la filiation, qui déterminent la parenté de l’enfant, de la parentalité, le comportement parental et l’exercice de certains attributs de l’autorité parentale. Elle nous rappelle que l’implication du donneur de sperme
dans la vie de l’enfant dont il fut le géniteur ne lui confère pas la paternité.
D’une lecture attentive du jugement, je retiens trois constats.
D’abord, la présence d’une personne trans dans le paysage familial ne change absolument rien dans l’application des règles de la filiation. La Cour d’appel le dit clairement. L’inconfort à l’égard d’une transition, pour ne pas dire la transphobie, n’a pas de portée juridique.
Ensuite, à côté des règles de la filiation, il y a un grand espace pour les figures parentales dans la vie d’un enfant. Nous l’expérimentons à peu près tous les jours dans le cas des familles recomposées. Le jugement nous rappelle que c’est la même chose lorsqu’il s’agit d’un couple lesbien (ou d’une personne seule) qui a un enfant avec l’aide d’un donneur connu. Les vrais parents d’un enfant né à la suite d’une procréation assistée sont ceux qu’identifient les règles de la filiation. Dans ce contexte, c’est l’intention des adultes qui l’emporte, et non pas la biologie.
Enfin, malgré tout ce qui a été dit relativement à la question de trois parents, la Cour d’appel s’est abstenue de la trancher. D’ailleurs, elle s’est montrée plus prudente et beaucoup moins catégorique sur cette question que dans certains de ses jugements.
Bref, le jugement de la Cour d’appel ne modifie pas le droit québécois. Il nous illustre certaines des implications de la grande réforme de 2002, par laquelle le législateur a consacré la légitimité et la véracité de la filiation qui suit la procréation assistée. C’est une décision juste.