Une percée dans la lutte à l’itinérance à Québec
Corey Sawers a été itinérant pendant plus d’une décennie, dormant où il pouvait et ramassant des canettes pour se payer
de la nourriture et des speeds. Puis, un jour, on lui a offert un toit.
L’homme de 34 ans, aux prises avec une dépendance aux métamphétamines, a reçu les clés d’une maison
de chambres dans le quartier Saint-Sauveur en novembre 2018.
Avec un sac de sport, quelques vêtements et pas grand-chose d’autre, Corey s’est installé dans sa nouvelle chambre, soulagé de pouvoir enfin compter sur un abri permanent. «C’est comme si la vie me donnait une deuxième chance», dit-il.
Corey fait partie d’un programme nommé Portes-Clés qui a entraîné une percée importante dans la lutte à l’itinérance à Québec.
Lancé en 2015 par huit organismes — PECH, Lauberivière, le Café rencontre, Miels-Qc, le YWCA, CF3A, le PIPQ et L’archipel d’entraide — Porte-Clés permet à des itinérants d’accéder à un logement subventionné peu importe leur condition. Le plus récent bilan montre qu’environ 80 % des 175 itinérants qui ont bénéficié de ce programme depuis six ans sont sortis de la rue.
Pour Laurie Boivin, intervenante chez PECH, ce bilan montre que la stratégie du «logement d’abord» est une des clés de l’atteinte de l’itinérance zéro visée par le maire de Québec, Bruno Marchand, d’ici 2025. «C’est vraiment un des moyens principaux,
je pense, pour atteindre cette cible-là», dit-elle.
Depuis qu’ils ont un toit, souligne Mme Boivin, de nombreux participants au programme Porte-Clés ont recommencé à travailler, ont renoué avec leurs familles, se sont fait de nouveaux amis, ont formé des couples ou font du bénévolat.
Selon PECH, qui coordonne le programme, environ 90 % des participants à Porte-Clés avaient réussi à rester en logement avant la pandémie.
Un tournant
de la nourriture et des speeds. Puis, un jour, on lui a offert un toit.
L’homme de 34 ans, aux prises avec une dépendance aux métamphétamines, a reçu les clés d’une maison
de chambres dans le quartier Saint-Sauveur en novembre 2018.
Avec un sac de sport, quelques vêtements et pas grand-chose d’autre, Corey s’est installé dans sa nouvelle chambre, soulagé de pouvoir enfin compter sur un abri permanent. «C’est comme si la vie me donnait une deuxième chance», dit-il.
Corey fait partie d’un programme nommé Portes-Clés qui a entraîné une percée importante dans la lutte à l’itinérance à Québec.
Lancé en 2015 par huit organismes — PECH, Lauberivière, le Café rencontre, Miels-Qc, le YWCA, CF3A, le PIPQ et L’archipel d’entraide — Porte-Clés permet à des itinérants d’accéder à un logement subventionné peu importe leur condition. Le plus récent bilan montre qu’environ 80 % des 175 itinérants qui ont bénéficié de ce programme depuis six ans sont sortis de la rue.
Pour Laurie Boivin, intervenante chez PECH, ce bilan montre que la stratégie du «logement d’abord» est une des clés de l’atteinte de l’itinérance zéro visée par le maire de Québec, Bruno Marchand, d’ici 2025. «C’est vraiment un des moyens principaux,
je pense, pour atteindre cette cible-là», dit-elle.
Depuis qu’ils ont un toit, souligne Mme Boivin, de nombreux participants au programme Porte-Clés ont recommencé à travailler, ont renoué avec leurs familles, se sont fait de nouveaux amis, ont formé des couples ou font du bénévolat.
Selon PECH, qui coordonne le programme, environ 90 % des participants à Porte-Clés avaient réussi à rester en logement avant la pandémie.
Un tournant
Aujourd’hui, Corey Sawers habite dans un petit appartement du quartier Saint-Sauveur.
LE SOLEIL, PASCAL RATTHÉLe programme Porte-Clés a marqué un tournant dans la lutte à l’itinérance à Québec, où il y a environ 545 sans-abris, selon le plus récent dénombrement (2018). Pour la première fois, huit organismes ont uni leurs forces autour de l’approche du «logement d’abord».
Cette approche repose sur l’idée qu’il est plus facile de reprendre sa vie en main quand on a d’abord un toit. Le «logement d’abord» se distingue du modèle standard «en escalier» où les itinérants vont dans les refuges et se voient offrir de l’aide en santé mentale ou en dépendance en attendant qu’ils soient prêts à intégrer un logement.
«On part du principe que chacun a le droit fondamental d’avoir un logement, explique Laurie Boivin. On ne demande pas aux gens qu’ils soient abstinents ou qu’ils s’investissent dans un traitement quelconque.»
L’approche du «logement d’abord» est de plus en plus répandue au Canada. Développée à New York dans les années 80 par le psychologue canadien Sam Tsemberis, elle se trouve au coeur d’une vaste campagne au Canada anglais pour mettre fin à l’itinérance.
La campagne, nommée Prêt pour zéro Canada, regroupe 27 «collectivités» — des villes, des régions et des comtés —, comme Edmonton, Toronto, Hamilton, Moncton, par exemple. Pour le moment, aucune ville québécoise n’en fait partie.
Lors d’une récente entrevue avec Le Soleil, le maire de Québec, Bruno Marchand, a affirmé que l’inspiration
de «l’itinérance zéro» lui est venue de Prêt pour zéro Canada.
M. Marchand a aussi mentionné l’exemple de la Finlande, un pays qui a placé l’approche du logement d’abord au centre de ses efforts pour éliminer l’itinérance d’ici 2027. Selon un rapport récent (2021) du gouvernement finlandais, l’itinérance
est en baisse continue depuis 2013 en Finlande.
Le «triangle» nécessaireComme en Finlande ou au Canada anglais, le programme Porte-clés à Québec ne s’arrête pas à l’accès au logement.
Il aide aussi les itinérants à garder leur toit.
Pour certains participants au programme, l’accompagnement est minimal. «Il y en a qui couchaient sous des galeries et, deux ans plus tard, ils sont dans un trois et demi subventionné et ça va numéro 1», dit Jean-Philippe Lapointe, propriétaire d’environ 300 logements et chambres au centre-ville de Québec et partenaire du projet Porte-clés.
Mais pour d’autres, la transition entre la rue et le logement est plus difficile. «Parfois, le clash est trop gros», dit M. Lapointe. Aux prises avec un trouble de santé mentale ou une dépendance à la drogue ou à l’alcool, certains traversent des crises. D’autres ont du mal avec le ménage ou invitent leurs amis de la rue à squatter et font trop de bruit au goût du voisinage.
Pour Jean-Philippe Lapointe, c’est le «triangle» entre les ex-sans-abris, les intervenants et le propriétaire qui permet au projet de fonctionner. Au fil des années, M. Lapointe est passé de 2 à 15 logements loués en partenariat avec le programme Porte-clés.
Une économie?Le programme Porte-Clés est payé par les fonds publics. Le gouvernement fédéral, partisan de l’approche du logement d’abord, finance le projet dans le cadre de la stratégie canadienne de lutte contre l’itinérance Vers un chez-soi.
Un programme de subvention au logement de l’Office municipal d’habitation de Québec (OMHQ) paye de son côté la majeure partie du loyer de chacun des participants à Porte-Clés. Les locataires s’engagent pour leur part à payer le loyer à la hauteur de 25 % de leurs revenus.
Selon PECH, le projet permet aux contribuables d’économiser de l’argent. Le coût annuel des services sociaux, de santé et de services juridiques offerts aux personnes itinérantes souffrant d’une maladie mentale s’élève en moyenne à 55 000 $ par personne, d’après une étude de l’Université McGill publiée en 2017 à partir des données recueillies dans les trois
plus grandes villes canadiennes (Toronto, Montréal et Vancouver).
Corey, lui, se bat toujours contre une dépendance aux méthamphétamines. Mais il va de mieux en mieux. Aujourd’hui, il habite avec sa chatte, Nala, dans un petit appartement aux murs jaunes du quartier Saint-Sauveur. Il fait son épicerie et prend goût à cuisiner.
Depuis un mois, il travaille comme barista dans un café situé dans les locaux de PECH. Il suit assidûment les matchs du Canadien et songe à jouer au hockey cosom. Il aimerait aussi trouver une copine.
S’il n’avait pas eu un toit avec le programme Porte-Clés, Corey ne croit pas qu’il aurait repris le reste de sa vie en main.
«Je pense que je serais encore dans la rue.»
LE SOLEIL, PASCAL RATTHÉLe programme Porte-Clés a marqué un tournant dans la lutte à l’itinérance à Québec, où il y a environ 545 sans-abris, selon le plus récent dénombrement (2018). Pour la première fois, huit organismes ont uni leurs forces autour de l’approche du «logement d’abord».
Cette approche repose sur l’idée qu’il est plus facile de reprendre sa vie en main quand on a d’abord un toit. Le «logement d’abord» se distingue du modèle standard «en escalier» où les itinérants vont dans les refuges et se voient offrir de l’aide en santé mentale ou en dépendance en attendant qu’ils soient prêts à intégrer un logement.
«On part du principe que chacun a le droit fondamental d’avoir un logement, explique Laurie Boivin. On ne demande pas aux gens qu’ils soient abstinents ou qu’ils s’investissent dans un traitement quelconque.»
L’approche du «logement d’abord» est de plus en plus répandue au Canada. Développée à New York dans les années 80 par le psychologue canadien Sam Tsemberis, elle se trouve au coeur d’une vaste campagne au Canada anglais pour mettre fin à l’itinérance.
La campagne, nommée Prêt pour zéro Canada, regroupe 27 «collectivités» — des villes, des régions et des comtés —, comme Edmonton, Toronto, Hamilton, Moncton, par exemple. Pour le moment, aucune ville québécoise n’en fait partie.
Lors d’une récente entrevue avec Le Soleil, le maire de Québec, Bruno Marchand, a affirmé que l’inspiration
de «l’itinérance zéro» lui est venue de Prêt pour zéro Canada.
M. Marchand a aussi mentionné l’exemple de la Finlande, un pays qui a placé l’approche du logement d’abord au centre de ses efforts pour éliminer l’itinérance d’ici 2027. Selon un rapport récent (2021) du gouvernement finlandais, l’itinérance
est en baisse continue depuis 2013 en Finlande.
Le «triangle» nécessaireComme en Finlande ou au Canada anglais, le programme Porte-clés à Québec ne s’arrête pas à l’accès au logement.
Il aide aussi les itinérants à garder leur toit.
Pour certains participants au programme, l’accompagnement est minimal. «Il y en a qui couchaient sous des galeries et, deux ans plus tard, ils sont dans un trois et demi subventionné et ça va numéro 1», dit Jean-Philippe Lapointe, propriétaire d’environ 300 logements et chambres au centre-ville de Québec et partenaire du projet Porte-clés.
Mais pour d’autres, la transition entre la rue et le logement est plus difficile. «Parfois, le clash est trop gros», dit M. Lapointe. Aux prises avec un trouble de santé mentale ou une dépendance à la drogue ou à l’alcool, certains traversent des crises. D’autres ont du mal avec le ménage ou invitent leurs amis de la rue à squatter et font trop de bruit au goût du voisinage.
Pour Jean-Philippe Lapointe, c’est le «triangle» entre les ex-sans-abris, les intervenants et le propriétaire qui permet au projet de fonctionner. Au fil des années, M. Lapointe est passé de 2 à 15 logements loués en partenariat avec le programme Porte-clés.
Une économie?Le programme Porte-Clés est payé par les fonds publics. Le gouvernement fédéral, partisan de l’approche du logement d’abord, finance le projet dans le cadre de la stratégie canadienne de lutte contre l’itinérance Vers un chez-soi.
Un programme de subvention au logement de l’Office municipal d’habitation de Québec (OMHQ) paye de son côté la majeure partie du loyer de chacun des participants à Porte-Clés. Les locataires s’engagent pour leur part à payer le loyer à la hauteur de 25 % de leurs revenus.
Selon PECH, le projet permet aux contribuables d’économiser de l’argent. Le coût annuel des services sociaux, de santé et de services juridiques offerts aux personnes itinérantes souffrant d’une maladie mentale s’élève en moyenne à 55 000 $ par personne, d’après une étude de l’Université McGill publiée en 2017 à partir des données recueillies dans les trois
plus grandes villes canadiennes (Toronto, Montréal et Vancouver).
Corey, lui, se bat toujours contre une dépendance aux méthamphétamines. Mais il va de mieux en mieux. Aujourd’hui, il habite avec sa chatte, Nala, dans un petit appartement aux murs jaunes du quartier Saint-Sauveur. Il fait son épicerie et prend goût à cuisiner.
Depuis un mois, il travaille comme barista dans un café situé dans les locaux de PECH. Il suit assidûment les matchs du Canadien et songe à jouer au hockey cosom. Il aimerait aussi trouver une copine.
S’il n’avait pas eu un toit avec le programme Porte-Clés, Corey ne croit pas qu’il aurait repris le reste de sa vie en main.
«Je pense que je serais encore dans la rue.»
MARC ALLARD
Le Soleil
https://www.lesoleil.com/2022/01/10/une-percee-dans-la-lutte-a-litinerance-a-quebec-facb6b7f084e9e207dbbf830a57f5b4c?utm_source=omerlo&utm_medium=mailer&utm_campaign=Aujourd%E2%80%99hui:+une+perc%C3%A9e+dans+la+lutte+%C3%A0+l%E2%80%99itin%C3%A9rance
Le Soleil
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