Une génération prise au piège
des réseaux sociaux
Je suis médecin de famille depuis près de dix ans. Ma clientèle est principalement pédiatrique, et c’est ma passion. J’ai le bonheur de voir grandir des centaines d’enfants et d’accompagner leurs parents dans cette belle aventure. Je suis également une maman d’adolescents.
Conseiller les parents de mes petits patients sur l’utilisation saine des écrans fait partie de mon travail. Mais d’année en année, je remarque que je dois intervenir de plus en plus tôt dans la vie de l’enfant. Malgré les recommandations actuelles qui sont largement diffusées, je suis souvent sidérée par le nombre d’heures passées sur les réseaux sociaux, et ce, dès un très jeune âge.
Le nombre de consultations pour des problèmes de santé mentale est en grande augmentation dans nos cabinets. Autour de moi, je vois des jeunes extraordinaires, qui ont tout pour être heureux, souffrir et se détériorer, et je ne peux pas le croire ! La pandémie y a contribué, bien sûr, mais ne peut expliquer à elle seule ce phénomène. L’utilisation des médias sociaux
est également pointée du doigt depuis quelques années.
Or, nous apprenions, ces derniers jours, que Facebook possède des informations qui démontrent que l’utilisation d’Instagram détériore la santé mentale d’un pourcentage significatif d’adolescents. Facebook le sait, le cache et ne fait rien. Pire, elle proposera sous peu une version pour les plus jeunes et élargira encore davantage sa clientèle. Ce projet vient d’ailleurs tout juste d’être mis en suspens à la suite des démarches de la lanceuse d’alerte Frances Haugen.
Conseiller les parents de mes petits patients sur l’utilisation saine des écrans fait partie de mon travail. Mais d’année en année, je remarque que je dois intervenir de plus en plus tôt dans la vie de l’enfant. Malgré les recommandations actuelles qui sont largement diffusées, je suis souvent sidérée par le nombre d’heures passées sur les réseaux sociaux, et ce, dès un très jeune âge.
Le nombre de consultations pour des problèmes de santé mentale est en grande augmentation dans nos cabinets. Autour de moi, je vois des jeunes extraordinaires, qui ont tout pour être heureux, souffrir et se détériorer, et je ne peux pas le croire ! La pandémie y a contribué, bien sûr, mais ne peut expliquer à elle seule ce phénomène. L’utilisation des médias sociaux
est également pointée du doigt depuis quelques années.
Or, nous apprenions, ces derniers jours, que Facebook possède des informations qui démontrent que l’utilisation d’Instagram détériore la santé mentale d’un pourcentage significatif d’adolescents. Facebook le sait, le cache et ne fait rien. Pire, elle proposera sous peu une version pour les plus jeunes et élargira encore davantage sa clientèle. Ce projet vient d’ailleurs tout juste d’être mis en suspens à la suite des démarches de la lanceuse d’alerte Frances Haugen.
Bien entendu, on voit aussi des choses inspirantes sur ces plateformes. Mais c’est une fraction tellement petite de ce qu’on y trouve et cela ne fait pas le poids face à la déferlante de publications axées sur l’apparence, qui elles, sont beaucoup plus lucratives pour Facebook et les créateurs de contenu. Des images que les algorithmes imposent malgré tous les paramètres de sécurité qu’on peut mettre en place.
Pourtant, je constate que mes patients et leurs parents connaissent ces données le plus souvent. Or, ils sont pris au piège. Le besoin de socialiser est fondamental chez nos jeunes et malheureusement, cette socialisation se déplace de plus en plus vers le virtuel. Celui qui n’y participerait pas peut être exclu d’une grande partie des interactions avec ses pairs. Certains y résistent ou y survivent. Ce sont des enfants dont la confiance en soi est solide. Mais les plus vulnérables en sont davantage affectés négativement,
et ce sont eux qui viennent consulter lorsque ça ne va plus.
Comme médecin, je suis souvent impuissante devant leur souffrance, car je n’ai accès qu’à très peu de ressources pour les aider. Les listes d’attente en psychologie sont pleines, et le réseau public est en crise comme chacun le sait. Je ne peux alors que me rabattre sur des conseils simples qui pourtant fonctionnent : davantage d’activité physique, davantage de moments de contemplation et limiter le temps passé sur les écrans et les médias sociaux. Mais c’est souvent extrêmement difficile à appliquer, car la dépendance
est installée et le jeune est terrorisé à l’idée d’être exclu.
Quoi faire comme parent, comme médecin, comme société ? Continuer à conscientiser davantage ? Demander à nos institutions de légiférer ? Demander aux écoles d’inclure davantage d’activités pour sensibiliser nos enfants ? De toute évidence, l’industrie ne se chargera pas de ce problème qu’elle a créé. Elle a trop à perdre.
Le plan d’action sur l’utilisation des écrans chez nos jeunes, qui sera déposé sous peu par le gouvernement Legault, sera une belle occasion de prise de conscience, mais pour l’instant, il ne semble pas comporter de recommandations au sujet des médias sociaux. J’espère que la version finale saura nous redonner espoir que les choses changent.
Je rêve du moment où on se regardera en face comme société et où nous comprendrons vraiment que nos comportements numériques nuisent à toute une génération. Je rêve aussi de voir nos adolescents protester ensemble contre cette situation dont ils sont victimes et refuser de continuer à y prendre part. J’espère que nous serons là pour les soutenir !
Pourtant, je constate que mes patients et leurs parents connaissent ces données le plus souvent. Or, ils sont pris au piège. Le besoin de socialiser est fondamental chez nos jeunes et malheureusement, cette socialisation se déplace de plus en plus vers le virtuel. Celui qui n’y participerait pas peut être exclu d’une grande partie des interactions avec ses pairs. Certains y résistent ou y survivent. Ce sont des enfants dont la confiance en soi est solide. Mais les plus vulnérables en sont davantage affectés négativement,
et ce sont eux qui viennent consulter lorsque ça ne va plus.
Comme médecin, je suis souvent impuissante devant leur souffrance, car je n’ai accès qu’à très peu de ressources pour les aider. Les listes d’attente en psychologie sont pleines, et le réseau public est en crise comme chacun le sait. Je ne peux alors que me rabattre sur des conseils simples qui pourtant fonctionnent : davantage d’activité physique, davantage de moments de contemplation et limiter le temps passé sur les écrans et les médias sociaux. Mais c’est souvent extrêmement difficile à appliquer, car la dépendance
est installée et le jeune est terrorisé à l’idée d’être exclu.
Quoi faire comme parent, comme médecin, comme société ? Continuer à conscientiser davantage ? Demander à nos institutions de légiférer ? Demander aux écoles d’inclure davantage d’activités pour sensibiliser nos enfants ? De toute évidence, l’industrie ne se chargera pas de ce problème qu’elle a créé. Elle a trop à perdre.
Le plan d’action sur l’utilisation des écrans chez nos jeunes, qui sera déposé sous peu par le gouvernement Legault, sera une belle occasion de prise de conscience, mais pour l’instant, il ne semble pas comporter de recommandations au sujet des médias sociaux. J’espère que la version finale saura nous redonner espoir que les choses changent.
Je rêve du moment où on se regardera en face comme société et où nous comprendrons vraiment que nos comportements numériques nuisent à toute une génération. Je rêve aussi de voir nos adolescents protester ensemble contre cette situation dont ils sont victimes et refuser de continuer à y prendre part. J’espère que nous serons là pour les soutenir !
LEDEVOIR
Sylvie Bourassahttps://www.ledevoir.com/opinion/libre-opinion/638550/libre-opinion-une-generation-prise-au-piege-des-reseaux-sociaux?&utm_medium=email&utm_source=27544&utm_campaign=Courrier+des+id%c3%a9es+-+Week-end+du+9+octobre+2021
Sylvie Bourassahttps://www.ledevoir.com/opinion/libre-opinion/638550/libre-opinion-une-generation-prise-au-piege-des-reseaux-sociaux?&utm_medium=email&utm_source=27544&utm_campaign=Courrier+des+id%c3%a9es+-+Week-end+du+9+octobre+2021